C’est un jeudi, jour de marché à Kolotomon, un village situé à 25 kilomètres au nord de Ségou au Mali. Le marché est animé et les forains font des aller- retour pour acheter ou vendre des articles ou des produits. Diarra Habibatou Sogoba est une jeune commerçante. Assise à l’entrée du marché, elle vend des légumes. Mme Diarra dit : « Grâce à l’espacement des naissances, je peux m’occuper de mon commerce et participer au fonctionnement de mon foyer. »

CP: Iwaria
Madame Diarra est mère de quatre enfants. Elle et son mari ont décidé de choisir la « Jadelle » qui est une méthode de contraception moderne de longue durée pour espacer les naissances. Elle dit : « J’ai accouché quatre fois en cinq ans de mariage. C’était difficile d’entretenir les enfants, faire les travaux ménagers et m’occuper de mon commerce. »
Madame Diarra explique que ses quatre dernières grossesses ont été toutes rapprochées de trois mois en moyenne après chaque accouchement.
A cause de ses grossesses rapprochées, madame Diarra et ses enfants avaient une santé fragile et n’arrivait pas à tenir son commerce alors que c’est sa seule source de revenus. Des fatigues chronique et anémie, manque de temps pour soi, frein à ses activités professionnelles, charge financière élevée. Et quant à ses enfants, ils avaient un retard de croissance et faible poids à leur naissance. Elle déclare : « Les médecins m’ont dit que mon utérus est fatigué, j’avais fréquemment de l’anémie à la suite des accouchements difficiles. J’avais de la peine pour mes enfants autrefois malnutris car j’étais obligée de les sevrés tôt. »
Elle soutient qu’elle a eu des difficultés à convaincre son mari d’espacer les naissances. En effet, la famille Diarra est de tradition musulmane. Selon certaines fausses idées reçues, la contraception est interdite en islam. Les hommes sont alors méfiants des méthodes de contraception.
Pour convaincre son mari à espacer les naissances, madame Diarra a fait recours à Assan Diarra, sa belle-sœur. Elle est la présidente du bureau communal de la Coordination des Associations et Organisations Féminines (CAFO). Femme leader, elle a bénéficié de plusieurs formations sur le planning familial auprès des ONG de la place. Elle connait les avantages d’espacer les naissances. Elle a organisé des échanges entre madame et monsieur Diarra pour leur expliquer les avantages de l’espacement des naissances. Connaissant bien la fermeté de son frère sur les questions religieuses et sa situation financière précaire, elle a su convaincre ce dernier. Elle dit : « J’ai beaucoup insisté sur le fait que la religion n’est pas contre l’espacement des naissances, ensuite je lui ai fait comprendre clairement que c’est la seule issue pour que sa famille recouvre la santé et pour qu’il soit stable financièrement. »
Selon plusieurs leaders religieux, tout ce qui pourraient dégrader la santé et l’épanouissement de l’être humain est à éviter.
En effet, espacer les naissances permet d’abord à la mère de récupérer entre deux naissances, d’éviter les grossesses rapprochées, les avortements à risque et surtout de pouvoir s’occuper de son activité génératrice de revenus.
Il permet une naissance avec un poids supérieur à 2500 g, les enfants seront bien nourris, mieux logés, mieux soignés et éduqués. L’homme pourra mieux supporter les dépenses de la famille et faire face à ses projets personnels. La femme quant à elle, son utérus aura plus de temps de se préparer pour une autre grossesse et aura plus de temps pour participer au développement socio-économique de sa communauté.
Aly Diarra est l’époux de madame Diarra. Il pensait que les méthodes de contraception pour espacer les naissances étaient déconseillées en islam et rendraient sa femme stérile. Grâce aux conseils de sa sœur, M. Diarra sait qu’il s’agit des fausses informations. Il se dit soulager. Déjà, M. Diarra observe un changement positif dans sa famille. Il déclare : « Grâce au planning familial, je parviens à économiser. Avant, je dépensais mon argent pour l’achat de médicaments de ma femme et mes enfants qui étaient tout le temps malade. Je recommande fortement l’espacement des naissances. »
Au Mali, la faible utilisation des services de santé de la reproduction est la cause de plusieurs maladies et décès des femmes pendant ou après l’accouchement et des enfants de moins d’un an selon l’Enquête Démographique et de Santé (EDSM-VI). L’enquête démontre que le nombre moyen d’enfants au Mali par femme est de 6,3. Cette situation prouve l’existence de besoins importants non satisfaits en matière d’offre de services de planification familiale de 23,9%. Les causes des grossesses rapprochées le mariage précoce, l’éducation sexuelle insuffisante et les pesanteurs socioculturelles et religieuses.
Madame Guindo est chargée de planification familiale à l’Association de Soutien au Développement des Activités de Populations (ASDAP). Selon elle, la contraception est un ensemble de mesures et de moyens de régulation de la fécondité misent à la disposition des couples, pour réduire la mortalité et la morbidité maternelles, infantiles et juvéniles notamment celles liées aux grossesses rapprochées ou non désirées. Contrairement à d’autres pays, le Mali a opté comme concept, l’espacement de naissance.
Elle ajoute que le planning familial (utilisation des moyens de la contraception) permet aux couples d’éviter les grossesses non désirées, ces méthodes favorisent le bien-être des enfants et des femmes, réduit les dépenses en santé des familles et permet à la femme de s’occuper pleinement de son épanouissement.
Mme Guido déclare que la législation au Mali garantit à travers la loi 02-044 du 24 juin 2002, le droit individuel de chaque personne y compris les femmes à choisir librement une méthode de planification familiale sans contrainte ni autorisation préalable. Mais, les femmes ont du mal à accéder aux produits contraceptifs à cause de l’ignorance des avantages de l’espacement des naissances et surtout des croyances non fondées d’ordre religieuses et la réticence des hommes.
Elle pense que seule une bonne sensibilisation des jeunes couples et aussi des beaux parents peuvent favoriser l’espacement des naissances. C’est pourquoi, elle encourage les jeunes couples à se rendre au centre de santé.
De son côté, Madame Sogoba est ravie de sa nouvelle situation. Elle dit : « Actuellement, je peux éviter les grossesses rapprochées, je m’occupe de mon mari et mon petit commerce marche bien. » Elle appelle les autres couples à adopter une méthode de planification familiale pour leur bien-être.
M. Diarra déclare que grâce à la contraception, sa famille ne manque plus de nourriture, il les achète des vêtements et a inscrit deux de ses enfants à l’école. A présent il compte construire sa propre maison pour quitter en location. Sa femme également parvient à suivre le calendrier de vaccination pour tous les enfants et ne rate pas les jours de foire à cause des travaux ménagers.
Rédigé par : Dioro Cissé
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